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L'escabelle
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30 juin 2009

Les Etreintes Brisées

Les Etreintes Brisées m’a paru un film très composite, riche mais guère homogène.

Il débute par une narration un peu lourde où les personnages sont caractérisés, listés, catégorisés sans  finesse particulière : un aveugle qui a dragué une passante prête à se laisser séduire à une vitesse confondante, une dame brune visiblement jalouse, et  qui ne se départira pas d’un jeu appuyé tout au long du film, le fiston, la visite d’un jeune homme qui  inspire la crainte et la répulsion, et sans surprise, un flash-back.

Les retours au présent  sont un peu décevants aussi : le mauvais cocktail de drogue, par exemple, quel intérêt ? Certaines révélations – chocs : « Tu es son fils », un non-événement qui tombe tellement à plat qu’on voudrait croire à une parodie.

L’histoire du passé, elle, nous tient en haleine. Peut-être parce qu’on y guette sans cesse les apparitions de Pénélope Cruz, et ses métamorphoses – Audrey Hepburn, Marylin, amante heureuse et riant de bonheur, épouse décomposée … Certainement aussi parce que le mélodrame nous accroche et nous entraîne.

Mais également parce qu’Almodovar joue avec nous, multipliant les références cinématographiques – une mise en scène à la Hitchcock pour la scène de l’escalier par exemple, les hardiesses de prise de vue, la gigantesque roue du parc d’attraction autour de laquelle se joue la tragédie, les corps qui se tordent dans des draps comme un Magritte , par exemple, et tout un palimpseste de réminiscences qui  donnent une richesse énigmatique aux scènes.

Un moment très réussi est la représentation du film partiellement remonté – un Almodovar genre « Femmes au bord de la crise de nerfs » qui nous fait rire, où l’on retrouve Pénélope avec bonheur, et un peu d’étonnement parce que ce n’est pas vraiment elle qui tient la vedette de cet extrait. Le passé et le présent se réconcilient, se réunissent enfin et le cinéaste, sa créativité retrouvée, peut renaître.

Il entre peut-être là une des hantises d’Almodovar, et de tout artiste (et même de tout être humain) : la crainte de ne plus créer, la peur de la mort… J’imagine que chaque spectateur y trouvera ses propres échos.

Pénélope Cruz  se révèle une actrice talentueuse et en pleine maîtrise de son jeu, comme dans Volver, déjà, ou Vicki, Cristina, Barcelona de Woody Allen, qu’elle illumine aussi.

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Commentaires
V
Avec ce que tu décris, tu me donnes envie d'aller voir Jaffa, qui malheureusement ne passe plus dans ma banlieue. Mais les vacances ne font que commencer et j'aurai sans soute une opportunité...
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V
Comme tu sais :),je suis moins sévère que toi avec le mélodrame almodovarien, dont le kitsch magistral emporte (presque toujours)la conviction. Mais à propos d'"étreintes brisées" et de mélodrame, je te signale un film israélien, Jaffa,qui,dans une tonalité toute différente,âpre et fiévreuse, reprend les fils du mélodrame pour en faire un récit archétypique des interrogations majeures de l'humanité... sur la filiation notamment(encore !).Il s'agit d'un Roméo et Juliette proche-oriental (on peut penser aussi à Rodrigue et Chimène ou à toutes les étreintes brisées de la littérature et des mythes...) avec cette histoire d'une femme-qui-porte-l'enfant-de-celui-qui-a-tué-son frère... Rien de "local" dans tout cela,l'opposition juif-arabe" n'est ici qu'anecdotique, contexte en forme de prétexte narratif. On y trouve aussi la figure de la "mauvaise mère"... Tu trouverais p-ê que là aussi ça fait beaucoup mais on voit bien ici comment les grosses ficelles du mélodrame peuvent atteindre à l'universel.
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G
Merci de cette belle critique, qui souligne des points que je n'avais même pas remarqués.<br /> J'ai pensé en te lisant au film d'Alain Resnais, Smoking no smoking, qui décrit les multiples possibilités auxquelles peut conduire un tout petit évènement. Il y a un peu de ça dans ce film, ou tout aurait pu se dérouler de façon différente, en fonction d'évènements très secondaires.<br /> Il reste un vrai destin, cette rencontre entre un homme et une femme, étreinte brisée, mais amour profond, rencontre de deux êtres.
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