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L'escabelle
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30 mai 2010

Les mots pour le dire, les mots pour agir, remarques libres.

Depuis quelque temps, des déclarations et pétitions contestent les propos d'Allègre, fondés sur des résultats volontairement faussés et des critiques infondées qui biaisent la réflexion et instillent un doute pernicieux: les industriels par exemple reviennent sur leurs coûteuses résolutions de limiter les gaz à effet de serre (puisqu'en fait ceux-ci ne seraient pas responsables des changements de climat). Tout récemment, dans Pourquoi tant de haine? Elisabeth Roudinesco attaque Michel Onfray pour son portrait-charge de Freud (Le Crépuscule d'une Idole), et dénonce à la fois son populisme, et une crise des savoirs qui nourrit grassement les provocateurs l'entretenant en retour. Il faut rétablir les faits, proteste-t-elle vigoureusement.

Les polémiques s'enflent à la mesure de la tribune ou de la chambre d'écho. Pas question de limiter la liberté d'expression au nom d'un respect de la bonne foi, ou des connaissances scientifiques éprouvées: n'importe qui doit pouvoir tout affimer. Si seulement 10% des articles scientifiques nient l'effet des gaz à effet de serre, ce point de vue occupe 50% des articles de presse a mesuré The Guardian dans une sélection de journaux. Alors il faut employer les mêmes armes, les mêmes porte-voix que les bateleurs qui vivent de leurs coups de théâtre.

Au sujet de la liberté d'expression, la critique d'un ouvrage de Marcela Iacub (rédigée par Jean-Louis Jeannelle) a attiré mon attention dans "Le Monde" du 14 mai. De la pornographie en Amérique interroge les limites de la liberté d'expression dans les sociétés démocratiques, en prenant l'exemple de la pédopornographie: même les plus fervents défenseurs de la liberté d'expression conviennent qu'il faut censurer certaines images et discours, ce qui a donné lieu à un "arsenal répressif". Or elle estime que c'est traiter ces représentations comme des manifestations directes, quasiment des actes. D'une certaine manière, à force de reconnaître que "dire, c'est faire" (au moins symboliquement), on finit par restreindre la liberté d'expression.

J'ai trouvé l'idée intéressante... Penser s'accomplit par le verbe, penser, c'est souvent dire, et si dire, c'est agir, c'est à la liberté d'opinion qu'on risque de s'attaquer.

Quelle leçon en tirer.. je ne sais pas encore, mais.. j'y travaille!

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Commentaires
V
Tu évoques beaucoup de points, et je suis très souvent d'accord avec eux. <br /> Oui, il y a des climato-sceptiques ailleurs. Mais leur point de vue représente une petite minorité chez les chercheurs. En revanche, ils servent des groupes d'intérêt qui leur donnent des moyens pour occuper la scène de manière disproportionnée.<br /> Ce qu'Allègre a reconnu, c'est "quelques fautes d'orthographe et une courbe prolongée" (voir son article dans le monde du samedi 29) - mais pas du tout les autres distorsions (qui occpuent 30 pages de mises au point signées par les chercheurs concernés). Dernière mauvaise foi en date: "ne misons pas trop sur nos modèles numériques, dit-il, car ils ne sont pas bons, revenons à l'observation des phénomènes". Or les scientifiques travaillent déjà avec l'observation, "évidemment" répliquent-ils. Typiquement, cette manière de présenter un raisonnement apparemment sensé est déjà une désinformation...<br /> Tu as raison personne n'est parfait, et Al Gore a grossi certains traits - mais en restant dans le cadre des résultats scientifiquement considérés comme l'état actuel des connaissances. C'est de la pédagogie, en quelque sorte...
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B
En effet Véranne poussons le raisonnement jusqu'au bout … mais ne faisons pas d'Allègre un cas particulier ! Car en effet ses paroles peuvent entrainer des décisions financières et écologiques … mais à ma connaissance il n'a pas le pouvoir de prendre ces décisions, et il n'en a pas pris; il ne peut qu'influencer ceux qui les prennent … et il est donc formellement rester au niveau du "dire". Que ceux qui contestent ses paroles lui répondent au lieu de demander sa censure à la ministre ! C'est le débat qu'elle a promis … mais que ces "scientifiques" ne sont visiblement pas pressés d'avoir. Je n'apprécie pas particulièrement Allègre mais je suis tout aussi surpris de voir la réaction de cette communauté de scientifiques qui font appel au pouvoir pour défendre leur doxa. Il n'y a pas qu'en France ou il y a des climato-sceptiques, poussés ou non par des lobbies, mais il n'y a qu'en France à ma connaissance ou les "scientifiques" en appellent à l'Etat pour trancher ! <br /> Et d'ailleurs qui peut croire un instant que le seul Allègre à eu un impact sur le résultat du sommet de Copenhague, ou même sur l'affaiblissement actuel du mouvement pour le climat. Mouvement qui est pourtant très largement soutenu par les gouvernements et les médias et certains lobbies industriels dont le nucléaire … Ne faut-il pas plutôt y voir un résultat de la lutte des pays émergents qui se battent pour leurs intérêts et ne veulent pas être freinés dans leur développement au nom de leur futures émissions de gaz à effet de serre, par les pays développés. Ces derniers en effet possèdent la technologie (nucléaire entre autre) qui permet ou permettra de limiter les émissions de carbone, et sont tout content de pouvoir ainsi ralentir le développement de ces concurrents "pollueurs". Et si les gens, dans nos pays développés, s'intéressent moins au climat qu'il fera à la fin du siècle c'est surtout que la crise est passée par là … et Allègre n'y est pas pour grand-chose !<br /> Je crois tout autant que toi qu'il faut limiter au maximum les émissions de carbone et d'ailleurs Allègre ne dit pas le contraire, mais il dit qu'il faut limiter l'utilisation des énergies à effet de serre, plus au nom de leur caractère d'énergie non renouvelables (caractéristique dont on est sûr), qu'à celui d'impact sur la température à la fin du siècle, qui n'est l'objet que de présomptions non démontrées selon lui (ce qui peut être contestée bien sûr). Ce qui est curieux d'ailleurs c'est qu'Allègre est un farouche partisan du nucléaire au nom de l'épuisement des ressources en pétrole ... ce qui fait qu'il se retrouve au coté du lobby nucléaire grand partisan de la limitation des émissions de carbone ! Il est fort peu probable qu'il aie un intérêt quelconque à défendre une position climato-sceptique. <br /> Seulement comme tu le dis il a dans son livre falsifié des données … et il l'a reconnu. Mais là encore prenons un peu de recul …. Son livre, comme il le dit, n'est pas un rapport scientifique qui s'adresse à des scientifiques mais un livre qui s'inscrit dans une polémique et qui s'adresse au grand public comme les conférences d'Al Gore ou les films de Yann Arthus Bertrand … et son éditeur dit-il lui a modifié une courbe pour mieux démontrer que la planète avait, dans les siècles passés connue des périodes plus chaudes que ce que les climatologues officiels lui promettent pour la fin du siècle, ce que tout le monde s'accordent d'ailleurs à reconnaître. La modification consistant à masquer que l'augmentation de la température depuis une trentaine d'années pouvait être corrélée avec l'augmentation des gaz à effet de serre dans l'atmosphère (ce que d'ailleurs la courbe ne suffit pas à démontrer mais qui donne une bonne présomption). Il a donc masqué une information pour mieux mettre en valeur une autre … il s'agit bien d'un mensonge scientifique ! Mais peut-on être sûr que de tels "procédés marketing", exagération pour mieux démontrer, n'ont pas été utilisés par Al Gore ou Yann Arthus Bertrand dans leur conférences ou film …. N'exagèrent t'ils pas aussi lorsqu'ils affirment sans rire que "la planète est en danger", n'est-ce pas un effet de style, une exagération comparable aux falsifications d'Allègre … car c'est une affirmation scientifiquement fausse bien sûre … la planète n'est pas en danger … car comme le montre les données non falsifiées sur la courbe qu'Allègre a reproduit … elle a connue des périodes plus chaudes que ce qu'on lui promet. Ceux qui sont en danger ce sont effectivement des millions de personnes qui seront obligées de migrer devant la montée des eaux … quelques % de la population mondiale … très loin donc de la disparition de la vie sur Terre que les plus catastrophistes nous promettent et qui sont pourtant relayer par les médias ! Il est d'ailleurs curieux de voir que la seule info que les médias ont relayée lors de la crise du nuage volcanique c'est que cette crise nous a fait économiser 200 000 tonnes de carbone en clouant les avions au sol pendant une semaine … mais sans dire que le nuage lui-même en a craché 150 000 tonnes par jour pendant près de trois semaines ! alors certes nous sommes responsables d'une partie des gaz à effet de serre et il faut les limiter ... faire des voitures électriques etc …. mais il faut me semble t-il savoir raison garder et contempler ces polémiques de cours de récréation avec le recul nécessaire.
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V
Vous décrivez vraiment bien une multitude de facettes que prend cette réflexion. <br /> Pour en revenir à Internet : je ne suis pas encore tout à fait habituée à sa puissance, qui donne encore plus d'ampleur aux déclarations et en rajoute dans le registre du polémique. Les points qui achoppent deviennent tonitruants, et il faudrait maintenant se résoudre à crier à tue-tête aussi pour défendre un point de vue.<br /> Dans le cas d'Allègre, Bernard, ses déclarations ne restent pas au niveau du "dire": elles entraînent de réelles décisions financières et écologiques. C'est bien cela qui est préoccupant. <br /> D'un autre côté, il serait encore bien plus grave de créer des structures de régulation visant à faire taire les trublions. Mais sur le plan individuel, on est tout de même bien démuni. Peut-être devrait-on davantage recourir au boycott, ne pas offrir de tribune quand la mauvaise foi est avérée: il a reconnu lui-même avoir falsifié des données… Il y aurait ainsi une ligne blanche à ne pas franchir, tout simplement, une déontologie minimum, des moyens que les fins ne justifient pas.<br /> Quant à la pédopornographie, évidemment tu vois juste, Volland: je ne suis pas brutalement devenue tolérante envers ce genre de choses. J'essaie seulement de pousser le raisonnement jusqu'au bout pour voir où il nous mène...
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B
En effet quelquefois "Dire c’est faire", la parole est, dans certaines circonstances, opératoire, comme le fait remarquer Volland "je te pardonne" ou en plus solennel « la séance est ouverte » par exemple … mais dans la plupart des cas dire ce n'est pas faire car c'est seulement dire. Considérer que, parce-que la parole peut influencer les autres, alors c’est comme un acte, donc on doit la considérer comme un acte … n’est-ce pas revenir en arrière de plusieurs siècles, revenir sur la liberté de parole, … pouvoir être condamné pour avoir blasphémé par exemple.<br /> Y a-t-il des mots ou des phrases qui tuent ? certes il y a des mots ou des phrases qui tuent le débat, qui arrête net la discussion, qui peuvent infliger une blessure psychologique profonde, mais cela dépendra beaucoup de chacune des personnes en présence, de son vécu, de sa psychologie, de sa subjectivité. Alors qu'un acte est un acte … dans toute son objectivité, un mot est objet du langage qui peut certes infliger une douleur psychologique, mais une arme est un objet réel qui pénètre dans la chaire et inflige une souffrance ou une mort physique. De même peut-on parler comme le faisait Bourdieu de violence symbolique ? Il me semble que le terme "violence" signifie d'abord un déchainement d'énergie qui provoque une douleur ou une mort physique. Peut-on confondre un mot avec une arme et une violence symbolique avec une violence physique ? «Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde», disait Camus. L'usage de la métaphore, de l'analogie ou du symbole peut être un effet de style pour mieux faire passer un sentiment, une impression, une situation … en littérature ou en poésie. Mais dès lors que l'on se situe dans le domaine des sciences sociales, du juridique, du débat public …. la justesse des mots employés doit être recherchée … sinon on entre dans le domaine de la manipulation ou au mieux de la confusion.<br /> Je rejoins donc la conclusion de Marcela Iacub rapporté par Véranne selon laquelle "a force de reconnaître que dire c'est faire on finit par restreindre la liberté d'expression" car chacun va dès lors s'autocensurer dans son expression publique, instaurant par là un politiquement correct qui tue le débat démocratique !<br /> Ceci dit, il faut bien reconnaître des limites à la liberté d'expression. Le mensonge dans les publicités qui peut tromper le consommateur. L'appel public au meurtre, l'incitation à la pédophilie, les images hyperviolentes … certainement. Mais de quelle coté penche la balance actuellement ? Trop de liberté de parole ou trop de restriction et de censure ? Trop de pluralisme ou trop de politiquement correct ?<br /> Y a-t-il trop de liberté sur internet ? Un député a proposé, pour de bonnes raisons sans doute (lutte contre la violence, la pédophilie, le terrorisme …) que chaque personne qui tient un blog sur internet affiche publiquement sur son blog son identité (nom et prénom) et ne puisse pas se cacher sous un pseudonyme ... un appel à l'autocensure en quelque sorte ! <br /> Ce fait est, il me semble, significatif de cette peur devant la liberté de parole, de cette volonté de vouloir contrôler la parole, sous prétexte qu'elle peut entrainer des passages à l'acte … et donc que la parole libre est quelque-part déjà un peu un passage à l'acte.<br /> Alors pour revenir aux exemples de départ … laissons le débat se dérouler, participons-y sans vouloir condamner les uns ou les autres pour blasphèmes ! Pour blasphème scientifique comme le fait Allègre à propos des climatologues du GIEC ou comme le font les "chercheurs pétitionnaires" a propos d'Allègre; ou pour blasphème philosophico-psychanalytique comme le fait Michel Onfray à propos de Freud ou Elisabeth Roudinesco à propos de Michel Onfray … il est vrai qu'ici ces condamnations ne sont que verbales … et reste donc, fort heureusement, dans le domaine du "dire". Les "chercheurs pétitionnaires" ont bien essayés de faire intervenir la ministre pour trancher … mais celle-ci a fort opportunément promis un débat public … donc de rester dans le "dire" … on l'attend toujours d'ailleurs ce débat !
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V
Il y a pourtant des cas, nous disent les linguistes, où dire, c'est faire ("je te pardonne".). Ceci étant, tu as raison, même si cette défense à tout crin de la liberté d'expression très anglo-saxonne me surprend un peu de ta part, surtout en ce qui concerne les exemples que tu évoques.En fait, il faut savoir sur quel terrain on se place exactement : en littérature, il n'y a pas en effet de censure acceptable, en dehors de celle que s'impose le lecteur au nom de son éthique personnelle.Mais il y a d'autres terrains - presse,essai politique, pamphlet, ... - où les mots sont davantage "perlocutoires"... Sans aller chercher des exemples extrêmes que tu imagineras sans peine, il est bien des cas où les mots tuent. C'est aujourd'hui un des problèmes d'internet : si je publie un texte d'une hyper violence, décrivant par exemple un meurtre horrible que je prétends vouloir commettre,"littérature" ou aveu pervers ? C'est la police qu'il faut convoquer ou la critique littéraire ? Le support,contrairement au livre ,ne permet pas de décider de l'intention du locuteur. Quelques affaires retentissantes ont déjà permis de mettre en évidence le caractère "indécidable" de ce genre de "texte".
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