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L'escabelle
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25 janvier 2010

A serious man

Le dernier film des frères Coen m'a un peu déçue, frustrée, dirais-je: il est très stimulant, titille, intrigue mais en même temps s'inscrit profondément dans la tradition culturelle juive (qu'il tourne gentiment en dérision) ainsi que dans l'Amérique de 1967 (séries télé cultes etc) De ce fait, bon nombre d'allusions échappent à la goy européenne que je suis....

Il commence avec la même convention qu'un James Bond (et les films d'action qui ont copié le procédé ensuite) : une scène avant le générique, destinée à frapper le spectateur, avec du suspense et de la violence teintée d'humour et de fantastique. Mais ensuite il tient plutôt de la fable philosophique, avec son personnage principal perpétuellement surpris, désemparé, voire même en état de sidération avant de sombrer dans une angoisse douloureuse. Il essaie de bien faire mais un flot d'événements incompréhensibles l'emporte comme un fétu.

Sur le thème de l'absurde, les frères Coen ont déjà tourné The Barber, dont l'étrangeté nous plonge dans un malaise persistant. Mais cette fois-ci, le héros, Larry, cherche des explications, un sens, éventuellement une martingale (voir son frère) Il est professeur de physique et pense que les mathématiques sont un outil indispensable à la compréhension de l'univers (au point de les inclure dans son examen de mi-semestre sans penser à prévenir les étudiants). On notera une subtile application de l'expérience du "chat de Schrödinger" à une histoire d'enveloppe pleine de billets simultanément présente et absente - présente quand il s'agit d'accuser l'enseignant de corruption, absente quand on l'accuse de diffamation, les deux hypothèses étant simultanées...

Y aurait-il une tentative d'interpréter le monde avec les théories issues de la relativité?

Je songe par exemple à la scène où le garçon écoute sa radio, après le samedi de la bar mitsva: est-elle consécutive dans la chronologie effectivement (on pense que oui, car le père lit sa facture d'avocat en même temps), ou est-ce une répétition en boucle d'une scène antérieure strictement identique? est-ce la perception que dans un autre univers, le fils n'est pas pris en flagrant délit mais qu'une tornade arrive? 

Le héros cherche également conseil auprès des rabbins, qui apportent (ou non) des réponses pour le moins curieuses.

Pourquoi se situer dans la tradition juive? Le film est très autobiographique, ce qui apporte une explication. Les frères Coen viennent subvertir l'ordonnancement auquel la mère se raccroche (le divorce "guet", par exemple, dont personne ne semble avoir entendu parler) Que penser de ce "dibbouk" qui réapparaît, notamment en se réincarnant dans le dernier rabbin? Est-ce le Juif Errant? Une parodie de Golem? Et ce "Je suis un homme sérieux" que le héros n'arrive pas à dire, à quoi correspond-il? Ou encore pourquoi insiste-t-il sur "I am not evil".. ? (pour obtenir sa titularisation) 

Un peu trop d'interrogations donc pour apprécier pleinement le film, plutôt misogyne par ailleurs, en plus... mais de bons moments tout de même!

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Commentaires
V
Je n'aurais pas deviné, en tout cas... Merci beaucoup d'avoir cherché l'info. <br /> Le choix de mot de substitution n'est sans doute pas fortuit, non plus... Encore des pistes de réflexion!
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V
Evidemment, c'est lumineux...Pour nommer celui qu'on ne saurait nommer,on dit "Ha Chem" = Le Nom, en hébreu! Il existe bien d'autres substituts : Hamaqon = le lieu, par exemple.C'est "là" que tout réside...Serious men, indeed !
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V
Oui, c'est une façon de (ne pas) le désigner mais avant de t'en dire plus, comme je ne suis quand même qu'un goy, même "initié", je me renseigne auprès d'un fin connaisseur de la tradition juive de ma connaissance, qui devrait satisfaire notre curiosité (car à vrai dire, je vais profiter de l'occasion pour m'instruire !) A suivre, donc...
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V
Merci de ton passage, Volland. Oui, j'ai peut-être un peu trop "étiré" le film pour y trouver un sens à tout prix! <br /> J'aime bien ton expression "goût pour la disputation", et la description qui suit.<br /> Juste une question: je n'avais jamais entendu le nom "Hachem". est-ce une autre dénomination pour Dieu?
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V
Je partage ta relative déception devant cette pochade ethnique iconoclaste, qui m'a néanmoins parfois fait beaucoup rire. Il y a des trognes, des mimiques irrésistibles, et un vraie sens des situations. Mais tout cela manque de scénario - on a parfois l'impression de développements annexes qui s'étirent à l'envi - et de réelle profondeur. A ce sujet, j'admire la subtilité de tes analyses mais je crains que tu n'accordes là une profondeur à un film qui n'en demande sans doute pas tant... Ceci étant, comme je suis, tu le sais, un "goy" initié :-)il y a dans la peinture du monde juif, son goût pour la "disputation" et l'art infini des questions sur les desseins parfois impénétrables d'"Hachem", une pertinence certaine, pleine d'autodérision et non dénuée de tendresse.
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