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14 mai 2013

L'Ecume des Jours

 

Ecume des Jours

 

L’Ecume des Jours (Philippe Gondry, 2013) est une oeuvre très intéressante, qu’il vaut sans doute la peine d’aller voir. En effet si le film m’a paru d’une réussite inégale, il est cependant très réjouissant. La première partie détaille l’univers plein de fantaisie de Boris Vian, emportant le spectateur de surprise en trouvaille. Cependant on ne peut rester indéfiniment « ravi de la crèche », d’autant que le film dérape en douceur vers une visite d’attractions à la Walt Disney. La chasse à l’anguille ou les plats-tableaux vivants servis à table font penser à des dessins animés, et ne visent d’ailleurs pas la moindre illusion de réalisme. Notons du reste que ce refus de l’effet spécial bien léché est fort plaisant dans son kitsch artisanal assumé.

La critique principale que je pourrais formuler est que le spectateur assiste passivement à l’étalage de cette profusion qui se donne simplement à voir mais ne se prête pas à l’élaboration collective. Jean-Pierre Jeunet a su bien mieux la mettre en œuvre dans Delicatessen, La cité des Enfants perdus ou Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain.

C’est lorsque le cinéaste range sa baguette magique que le spectateur, sorte de belle au bois dormant figée dans un ravissement éternel, peut revenir à la vie. Le baiser du prince charmant s’inverse en baiser de la mort, ouvrant la bulle magique à la fleur toxique du nénuphar qui va détruire Chloë. Le temps reprend son vol, le spectateur lit les signes, construit la logique de la dégradation inexorable d’un univers où la mort s’insinue, lézarde les murs, occulte la lumière de ses toiles d’araignées, fait pâlir les couleurs… Cette seconde partie est véritablement émouvante.

On ne peut évoquer le film sans parler de sa musique épatante (surtout si on aime Duke Ellington), ni évidemment de Jean-Sol Partre dont le charisme conduit à de véritables émeutes. Gad Elmaleh et Omar Sy relèvent efficacement le défi. Romain Duris est à l’aise dans son personnage et Audrey Tautou est très bien aussi – mais des acteurs plus jeunes auraient peut-être mieux collé à l’innocence de l’amour que se portent les héros. Dommage aussi de choisir une actrice à la fraîcheur indéniable mais totalement prévisible pour une intrigue dont une grande partie de la séduction repose sur la surprise.

En tout cas, une grande réussite de ce film est sans doute de donner envie d’en parler, de confronter son point de vue à celui d’amis qui l’auraient vu aussi… 

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Commentaires
V
J'ai bien aimé le rôle de Gad Elmaleh, moi aussi, plus complexe que les autres personnages, sans doute. Et bien aimé Gad Elmaleh comme acteur, aussi.. Bcp de présence.
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P
J'avais un souvenir très vague du roman de Boris Vian et je ne crois même pas qu'il m'ait spécialement plu, à l'époque. Je te suis tout à fait dans ton analyse : alors que la première partie du film, amusante et surprenante, finit par produire un catalogue d'étrangetés qui laisse le spectateur intéressé, distrait, mais peu ému par l'histoire d'amour, la seconde partie donne enfin aux personnages une fragilité qui touche, une grâce sortie des décombres, des débris et de la poussière. En effet, les gens qui souffrent voient le même monde que les autres, mais pour eux il est devenu obscurci et menaçant. Je n'ai pas été émue par l'histoire d'amour naissant, mais par l'histoire de cet amour tué dans l'oeuf sans pouvoir s'épanouir. Le seul qui s'épanouit, c'est le nénuphar qui étouffe lentement Chloé. <br /> <br /> Audrey Tautou, trop proche en effet de son rôle dans Amélie Poulain. Celui que j'ai préféré, c'est le personnage joué par Gad Elmaleh, parce qu'il montre ses failles tout de suite.<br /> <br /> La rupture de ton entre première et deuxième partie déséquilibre le spectateur : après s'être amusé, il subit sans pouvoir rien faire ce décor qui l'entraîne dans sa noirceur en même temps que les personnages. Tu fais allusion à la musique...qui était sûrement superbe, mais ça m'inquiète, je ne m'en souviens plus du tout ! <br /> <br /> Je ne me souviens que de la musique du coeur de Chloé qui bat faiblement et de son souffle qui s'amenuise. Et je n'ai même pas envie de relire le roman, comme ça m'arrive souvent dans ces cas-là : envie de rester sur l'écume des jours de Gondry...
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