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17 juillet 2014

Jeune et jolie, François Ozon

Le dernier message et un caprice moqueur de l'actualité m'ont renvoyée dans les cordes de mon ring intérieur, comme rappelée à une forme de modestie et finalement réduite au silence.

Le plus dur, c'est presque de revenir, d'autant que pour mes sujets favoris, cinéma et littérature, j'ai toujours un temps de retard. Autant l'assumer, du coup: je vais parler des films que je vois sur ma chaîne câblée - tant pis si c'est 12 à 14 mois après leur sortie: il y a peut-être d'autres amis du cinéma en différé sur ces ondes. Du coup, attention: spoiler - je suppose que les lecteurs connaissent l'histoire..

J&J

La sortie de Jeune et Jolie, de François Ozon, ne m'avait pas intéressée en 2013, sans doute éclipsée par La Vie d'Adèle dans mon esprit. L'été de ses 17 ans, Isabelle (ou Léa, suivant les circonstances) perd sa virginité de sang-froid - elle n'exprime aucun émoi  pour le jeune homme,  vit l'opération dans un dédoublement glaçant, le fuit ensuite. Une fois les vacances terminées, elle rentre à Paris reprendre sa vie normale de lycéenne, à un détail près: elle organise des rencontres tarifées sur internet. Les clients sont bien plus âgés qu'elle. A l'exception d'un mufle presque brutal (et fauché: hôtel 2 étoiles contre des hôtels de luxe pour certains - y a t-il un message bo-bo derrière?),  les autres clients sont corrects dans l'ensemble, voire pour l'un tendre et (grand-) paternel. Léa persévère et s'applique. Elle cache les billets sous sa pile de pulls.  C'est l'automne, puis l'hiver. Sa mère est prévenue par la police à la suite d'un décès... Avec elle, l'émotion explose , le dégoût, les reproches pleuvent. Léa redevient Isabelle, toujours aussi lisse et distanciée, tâchant de vivre une relation classique avec un jeune de son âge. Mais elle n'est pas satisfaite, et c'est un geste trechnique qui la ramène à ce que l'on comprend être... sa nature, disons, son projet professionnel authentique.. ?

La prostitution est vue sous l'angle d'une sexualité différente qui s'assume progressivement dans la prise de conscience du personnage. Isabelle/Léa est jugée par sa mère et sommée de s'expliquer. Mais avec des interlocuteurs a priori peu engageants (police, psy) elle  échange finalement grâce à une neutralité professionnelle respectueuse.   Implicitement cette transgression est mise en parallèle avec une autre, qui ne crée plus de remous aujourd'hui: l'adultère. On retrouve la même problématique que pour l'homosexualité - se découvrir et s'accepter, malgré la pression de la désapprobation sociale. 

Bon, pourquoi pas. Le sujet de film serait alors "une jeune femme qui aime les relations sexuelles avec des inconnus qui la paient". Nous tenons-là un Emmanuelle Episode 1, peut-être.

On est tout de même tenté d'y soupçonner une intention plus militante qu'un simple portrait, celle de redorer l'image de la prostitution peut-être, ou même simplement de filmer un fantasme. Et puisque l'intrigue tourne à la mise en examen et au procès en aberration sexuelle, dommage que la parole n'ait pas été donnée à l'accusation, qui se résume à l'hystérie de la mère. Certaines scènes cependant se passent de commentaires, et sont laissées à l'appréciation des spectateurs.  C'est justement là une grande qualité du film: respecter le spectateur, qui ne repart pas avec un message précis.  Et puis par ailleurs, le film est très beau visuellement; la jeune femme est filmée avec une pudeur miraculeuse étant donné le sujet, elle garde son mystère et son intimité. Le choix des chansons de Françoise Hardy est audacieux.

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